samedi 26 février 2011

Le début de quelque chose...


Tout ce qui se brasse du côté du monde arabe pourrait-il inspirer chez nous un sursaut démocratique ? C'est à espérer.

Car notre regard sur le monde arabo-musulman est tordu depuis le début de la décennie 1990, par un courant fort articulé mais inquiétant qui a émergé, particulièrement aux USA : le néo-conservatisme. Ce courant cherchait à réaffirmer la supériorité morale de l'Occident sur les autres civilisations de notre planète, en critiquant de haut la «civilisation musulmane», supposée incapable de rationalité ou imperméable à la démocratie. Ce regard biaisé et simpliste (où situer l'Indonésie ou la Turquie dans cette civilisation supposément homogène ?), a longtemps été coupable d'appuyer des Tyrans comme Saddam Hussein, la famille Saoud, Moubarak, Ben Ali, Kadhafi, Bouteflika et tant d'autres - sous prétexte que ces dictatures servaient de remparts contre l'islamisme.

Or, c'est la rue arabe qui nous rappelle ces jours-ci l'importance de la mobilisation collective face à l'État. Et ce sans que l'islamisme y soit pour une grande part dans la majorité des pays sous secousses démocratiques...

Chez nous, près de 250 000 personnes ont signé une pétition appelant le 1er ministre Jean Charest à démissionner, étant donné son entêtement à ne pas vouloir déclencher une Commission d'enquête publique dans la construction et l'octroi de contrats gouvernementaux ainsi que son refus à imposer un moratoire avant de nous lancer dans l'exploitation des gaz de schiste...

Sommes-nous capables de passer de la parole aux actes ? Un simple clic à partir de Facebook ou Twitter peut-il chez nous aussi, mener à une mobilisation extraordinaire pour réclamer la démission de Jean Charest ?

Un collègue de travail à moi vient de lancer l'initiative : le 12 mars prochain, passez de la parole aux actes et venez DANS LA RUE manifester votre colère contre la corruption et l'aveuglement de notre premier ministre ! (Lieu : Place du Canada, coin René-Lévesque et Peel - Date/heure : samedi 12 mars 2011 12:00)

Ce pourrait être le début de quelque chose... Notre version 2.0 du printemps arabe...

jeudi 24 février 2011

Kadhafi : un test pour la Communauté internationale.


Le Colonel Kadhafi, qui s'accorche dangereusement au pouvoir en Libye depuis que sa population a enclenché les protestations dans la foulée des révolutions tunisienne et égyptienne est un test pour la Communauté internationale.

Dans les années 1990, une série d'interventions dites «humanitaires» ont été autorisées par l'ONU dans le but de protéger des populations civiles identifiées comme victimes ou cibles de conflits armés. L'opération la plus connue fût lancée en ex-Yougoslavie pour «protéger» les populations de Bosnie contre les milices serbes... Ces missions ont été et avec raisons, fortement critiquées, parce qu'elles ont souvent favorisé l'objectif d'expansion territoriale d'une Grande Serbie en contribuant à déplacer des populations civiles pour éviter des massacres... Leur inefficacité et le ridicule de leur mandat (mission de «maintien de la paix» en terrain de guerre !) y est aussi pour beaucoup dans toute la réévaluation de ce type de missions. C'est pourquoi nous ne parlons plus du «Droit d'ingérence humanitaire» mais de la «Responsabilité de protéger» les populations civiles devant des régimes qui faillissent à le faire ou menacent leurs populations.

Reste que l'ambition de la Communauté internationale et le rôle de l'ONU demeurent associés à cette responsabilité : préserver la paix et la sécurité, valoriser la vie humaine et protéger les civils en zones de conflit. Les zones d'exclusions aériennes autorisées par l'ONU en Irak durant toute la décennie 1990 avaient pour but d'empêcher le régime de Saddam Hussein de bombarder sa population d'origine kurde, reconnue comme hostile à son autorité.

Le sanguinaire et orgueilleux colonel Kadhafi a un parcours politique semblable à celui de Saddam Hussein. Il est arrivé au pouvoir en 1969 sous une étiquette plutôt nationaliste arabe. Dans la décennie 1980, la Libye est devenue un État subventionnaire du terrorisme international et promoteur d'un anti-occidentalisme notoire. Peu à peu, le régime Kadhafi a glissé en réislamisant son espace politique. Puis sa rhétorique est devenue pan-africaine et anti-terroriste après septembre 2001, pour redevenir fréquentable... Aujourd'hui, devant cette extraordinaire démonstration de force de caractère et de courage des populations arabes, il s'apprête à mourir en Martyr...

Il y a un autre parallèle à faire entre Saddam et Mouhamar Kadhafi: les deux ont, au fil du temps, mis en place un pouvoir autoritaire et centré sur leurs clans. (Voir cet excellent article sur la question des tribus en Libye)

Que fera la Communauté internationale ? Et les régimes arabes en transition comme l'Égypte et la Tunisie, les deux voisins immédiats ? C'est un véritable test pour la crédibilité de l'ONU, des USA et de la ligue arabe...

mercredi 23 février 2011

«Le Québec: ce que l'humanité a de mieux...»

«Le Québec: ce que l'humanité a de mieux à offrir».

C'est Jean Charest qui a dit ça lors de son délirant discours inaugural aujourd'hui à l'Assemblée nationale...

Que voulait-il dire ? Que nous pouvons inspirer le reste de l'humanité par ... Notre corruption qui gangrène tout le processus décisionnel du national au municipal ? Le népotisme ? Peut-être pourrions-nous exporter le langage vide et mensonger de notre 1er sinistre qui dit ce que l'on veut entendre (en environnement par exemple) en posant des gestes contraires ? Ou encore diffuser une conception instrumentale de l'éducation et de la langue où le savoir doit nécessairement être cool et high tech (tous les profs auront un tableau blanc intelligent et un portable !) et en anglais (50% de la 6e année en anglais d'ici 5ans)?

Mais fallait-il vraiment espérer autre chose que le déni et la fuite en avant ? Peut-être que Charles Sirois de la nouvelle Coalition pour l'avenir du Québec pourrait s'allier avec les libéraux de Jean Charest : ils ont tous les deux un goût prononcé pour ce qui est «à la mode» en plus de priser les écarts entre le propos et l'action...

Charles Sirois, la coquille vide.

Lors de la 1ère conférence de presse de la Coalition pour l'avenir du Québec, l'accolyte de François Legault, Charles Sirois, se fait poser la question suivante : «Que pensez-vous du projet du gouvernement fédéral de faire une seule Commission des valeurs mobilières, malgré l'opposition du Québec ?»

M. Sirois, qui ne semble pas avoir lu son propre manifeste dans lequel on insiste sur l'importance de réaffirmer notre nationalisme économique et de maintenir des sièges sociaux ou centres de décisions dans ce domaine, répond qu'il n'a pas d'opinion sur le sujet...

Et M. Legault qui voulait évacuer la question nationale du débat... C'est bien parti !

lundi 21 février 2011

La coalition pour l'avenir du Québec.

Ça y est ! Contrairement à mes prédictions, François Legault a finalement lancé son mouvement politique : La Coalition pour l'avenir du Québec est née...

Son «programme» est publié ICI et sera sujet à discussion (tournée pan-québécoise) d'ici à ce que le tout se transforme en plateforme d'action l'automne prochain.

Il y a d'excellentes choses sur lesquelles j'ai souvent discouru dans ce blogue à propos de ce mouvement politique :

- L'impasse créée par notre double-échec politique, échec à réformer le fédéralisme canadien et échec à faire du Québec un pays; cette impasse doit être surmontée en cherchant à revenir à l'essentiel: Faire du Québec une nation capable d'intégrer ses immigrants en français; valoriser notre culture nationale et en faire un pôle d'attraction incontournable de notre identité.

- Revaloriser l'éducation et en faire une priorité nationale (je remarque que le texte du Manifeste de M. Legault questionne entre les lignes le pédagogisme débilitant de notre Ministère de l'éducation qui forme des cancres comme profs au secondaire, c'est bon signe : il y a au moins un discours sur la nécessité de l'effort et sur celle d'investir dans les profs comme dans le réseaux).

- L'idée avancée de revenir à un certain nationalisme économique me fait aussi plaisir, mais son contenu m'apparaît pour le moment un peu creux. Si ce nationalisme impliquait une réappropriation de nos ressources naturelles qui sont dilapidées et contrôlées par des capitaux privés contribuant aux partis au pouvoir, vous m'en verriez satisfait, mais le discours de M. Legault demeure évasif sur la question et l'entourage de sa coalition embryonnaire n'a rien pour me rassurer sur ce sujet...

Enfin, (mais nous y reviendrons sûrement), il n'y avait rien dans la conférence de presse de M. Legault sur l'environnement et sur la nécessité d'opérer un virage vert dans le domaine économique et énergétique pour faire du Québec un pôle de développement d'avenir en Amérique du Nord. Ceci m'apparaît quelque peu déphasé... et pour le moins décevant !

Maintenant, ceci demeure pour le moment un mouvement qui lance une vaste consultation. À vous de lui inculquer une direction !

Mais l'idée déjà avancée en ces pages d'une Grande coalition pour le changement est toujours envisageable... Sans quoi le cauchemar de 2007 (des libéraux corrompus et déconnectés reportés au pouvoir à cause de la division du vote d'opposition) peut tout aussi bien se reproduire...

vendredi 18 février 2011

Chris Christie : l'après-Obama.

Je vous ai parlé l'année dernière de Chris Christie, le Gouverneur du New-Jersey, comme une figure potentielle pour «battre Obama» du côté républicain en 2012. En tout cas, il apparaît pour moi beaucoup plus dangereux que Sarah Palin. C'est un homme intelligent, articulé, drôle et populiste à souhait. Un genre de Reagan gros format ou encore un Régis Labeaume américain (avec tout ce que ça implique en proportions...).

Eh bien Chris a annoncé qu'il n'était pas prêt pour la présidence en 2012 et que sa femme le tuerait s'il osait briguer la candidature républicaine... Mais son discours et la façon qu'il a de le tenir demeurent, et je crois fortement que c'est ce genre de personnalité qui émergera dans l'après-Obama.

Harper et le Parlement.


Stephen Harper est un homme dangereux, particulièrement parce que sa manière de gouverner se situe largement dans la rigidité. L'axe de la rigidité en politique est indépendant de l'axe gauche-droite, il serait donc un «axe vertical»:

Cet axe se rapporte aux façons d'exercer le pouvoir et aux rapports que la formation partisane favorisera entre l'État et la société civile. La position de la Rigidité sur cet axe se détermine ainsi :
- Le parti sera prêt à utiliser la violence, à réprimer la dissidence, à chercher à discréditer ses adversaires plutôt que (dans la souplesse) débattre sereinement d'enjeux où de visions opposées qui s'affrontent...
- Le pouvoir y sera concentré au sein d'un groupe restreint et il sera centralisé, sans contrepoids indépendants.
- La société civile sera de plus en plus dépendante de l'État, ou pire encore, dans l'extrême-rigidité, elle n'existera plus. Seul l'État occupera toute la scène, les individus agiront seuls face à l'État, sans associations libres pouvant les défendre et les informer pour qu'ils puissent exercer leurs libertés.

Or, si vous lisez un peu sur la question ces temps-ci, tous les feux sont au rouge en ce qui concerne les rapports que Stephen Harper entretient avec le Parlement: le pouvoir central de notre système politique, le lieu par excellence de surveillance et de contrôle du gouvernement; le détenteur de la «souveraineté» et le lieu d'émanation de la volonté populaire. Stephen Harper méprise cette institution, il met fin à ses travaux lorsqu'un vote de confiance risque de le faire tomber (!); il ment effrontément aux députés et aux comités parlementaires qui le questionnent; il cache des informations, il falsifie des documents; réprime les personnalités et organismes qui ne pensent pas comme lui, etc. Que voulez-vous de plus ?

Qu'on parle en plus de son idéologie réactionnaire, de sa vision créationniste de la vie humaine, de sa volonté de transformer la culture au Canada ?

Chantal Hébert publie aujourd'hui un papier dans le Toronto Star qui affirme que la crise actuelle (le gouvernement Harper est accusé d'outrage au Parlement parce que la ministre Bev Oda a falsifié un document et a menti devant les comités parlementaires) est un meilleur argument pour déposer une motion de non-confiance et déclencher des élections : le gouvernement Harper constitue une menace à notre système démocratique parce qu'il opère un travail de sape et d'affaiblissement des différents contre-pouvoir existants dans un régime parlementaire.

jeudi 17 février 2011

La culture au coeur du développement.

Agenda 21C
Le Ministère de la culture du Québec (oui oui, notre ministre Christine St-Pierre peut lancer des initiatives prometteuses et s'abstenir de dire des âneries pendant quelques temps...) décide de lancer une série de consultation devant mener à la formulation d'un AGENDA 21 pour la CULTURE : l'Agenda21c.

L'idée est de mettre la culture au coeur du développement économique et social et de l'intégrer dans toutes les sphères de décision, comme c'est le cas avec le concept de développement durable pour l'environnement.

Il me semble que l'initiative mérite d'être soulignée. Surveillez les consultations menées par l'INM. (Voir ICI et ICI)

J'ai toujours considéré que notre société devait mettre la culture au coeur de son développement, particulièrement dans le domaine de l'éducation où sa place pourrait être beaucoup plus imposante tant dans le cursus scolaire que dans le parascolaire (avec les sports sur lesquels nous reviendrons un jour...).

La culture est notre principale richesse naturelle inépuisable : elle constitue le coeur de notre originalité en Amérique et représente aussi un domaine d'innovation important que nous sommes loins d'investir suffisamment il me semble.

Allons-y donc pour quelques fleurs à cette initiative de l'Agenda21c !

mardi 15 février 2011

David Cameron et le multiculturalisme.

Le 1er ministre britannique David Cameron impressionne par sa franchise depuis son arrivée au pouvoir. Il a entre autres commis un incident diplomatique lors de sa visite en Inde en accusant le Pakistan d'être complaisant envers le terrorisme islamique dans la région et d'être en partie responsable des difficultés de la mission militaire de l'OTAN en Afghanistan (vérité souvent évitée en diplomatie...).

Dans l'extrait ci-bas, il discute franchement des dérives de la politique du multiculturalisme, politique officielle longtemps favorisée par tous les partis politiques britanniques. Cette réévaluation du multiculturalisme semble d'ailleurs se généraliser en Europe : les Pays-Bas reviennent à la nécessité d'établir des balises claires (maîtrise de la langue, adhésion à certaines valeurs jugées fondamentales, etc.) permettant de mesurer une bonne intégration des immigrants; la chancelière allemande Angela Merkel vient de proclamer «l'échec du multiculturalisme» dans son pays.

Écoutez David Cameron, vous verrez qu'il proclame lui aussi l'exigence pour toutes sociétés d'établir clairement ce que Fernand Dumont appelait «nos raisons communes», c-à-d les éléments qui constitueraient la base de notre culture publique commune...

En espérant que ce débat qui est lancé en Europe puisse aussi influencer notre propre impasse multiculturelle (voir la rubrique d'hier...).

lundi 14 février 2011

Le bilinguisme «canadian».

Yves Boisvert rend compte ce matin dans La Presse d'un sondage sur le bilinguisme au Canada. Plusieurs paradoxes ressortent de celui-ci :

- D'abord, les Québécois - les plus bilingues d'entre tous au pays - ressentent que le français est menacé au Québec et que le bilinguisme canadien se porte plutôt mal; mais ils reconnaissent qu'il est très important de maîtriser l'autre lange officielle.
- De leur côté, les Canadiens-anglais perçoivent leur pays comme réellement bilingue, mais ne considèrent pas important de maîtriser le français...

Il semble donc que les «deux solitudes» perdurent dans les esprits. L'article d'Yves Boisvert ajoute que les Québécois considèrent maintenant que ce n'est plus «les Anglais» mais bien le multiculturalisme qui menace le fait français au Québec. Et Boisvert de conclure que cette crainte à l'égard du multiculturalisme est reliée aux revendications religieuses des nouveaux arrivants : «L'identité québécoise canadienne-française a été construite autour de la langue et de la religion catholique. Voir s'affirmer d'autres religions avec autant de ferveur, c'est remettre en question l'identité. C'est donc menacer la langue...»

Je rajouterais qu'il y a quelque chose de plus profond qui se profile derrière cette crainte posée par la politique canadienne du multiculturalisme : en l'adoptent en 1971 et en la constitutionnalisant en 1982, Pierre Elliott Trudeau faisait du Québec une communauté culturelle parmi d'autres au pays... Il brisait le projet québécois moderne (celui d'André Laurendeau, de René Lévesque, de Robert Bourassa, etc.) de FAIRE DU QUÉBEC UNE SOCIÉTÉ D'ACCUEIL capable d'intégrer ses immigrants en français !

Avec le multiculturalisme, l'immigrant qui arrive au Québec arrive en fait dans UNE nation bilingue et multiculturelle. C'est toute l'ambition de la loi 101 qui est fragilisée par cette politique hypocrite et mesquine...

Mais la faute ne relève pas que du Fédéral. Les différents gouvernements du Québec ont fini par adopter cette posture du Canada bilingue et multiculturel au Québec en communiquant souvent en anglais avec les nouveaux arrivants et en se conformant au relativisme des valeurs inhérant au multiculturalisme dans ses programmes d'éducation et ses façons d'entrer en contact avec les immigrants...

Nous y reviendrons, car la politique du multiculturalisme est de plus en plus décriée - on vient de proclamer son échec en Europe !

vendredi 11 février 2011

18 jours...

Il semble qu'Hosni Moubarak ait accepté de quitter le pouvoir... Après 18 jours de mobilisation historique ! N'est-ce pas inspirant ? Le poids du nombre existe encore !

Moubarak, le pompier-pyromane.


La rue arabe continue de se mobiliser, particulièrement en Égypte, où, devant l'entêtement d'Hosni Moubarak, le peuple demeure intraitable et réclame toujours son départ.

Bien sûr que Moubarak doit partir, non seulement parce que son autorité n'existe plus, mais également parce que sa réaction à la crise récente démontre toute son irresponsabilité et son orgueil : l'homme a décidé de se poser en «gardien de l'ordre et de la stabilité» en affirmant que son départ hâtif mènerait au chaos ! Mais on commence à comprendre que sa stratégie consiste plutôt à agir en pompier pyromane : il lance ses partisans contre les manifestants et les journalistes étrangers ou encore il utilise ce qu'il contrôle encore pour fragiliser sa succession potentielle... Bref, il tente par tous les moyens de repousser son départ. Est-ce pour protéger et transférer ses avoirs ? Pour renforcer son rapport de force avant de quitter, de façon à éviter des procès et dépossessions ?

Chose certaine, sa stratégie puise son inspiration dans un autre régime qui lui aussi, pour le moment, réussit à se maintenir : celui d'Abdelaziz Bouteflika, le Président algérien. Les deux hommes partagent maintenant une même méthode, celle de se présenter en rempart contre l'islamisme (pour bénéficier ainsi de l'appui ou de la complaisance de l'occident) tout en étant générateur de désordres à l'interne, pour pouvoir ainsi accuser les courants islamistes et démontrer au reste du monde que sans eux, le chaos ou le radicalisme triomphent... Plusieurs indications crédibles démontrent que le régime Bouteflika a commis une série d'attentats terroristes contre sa propre population dans les années 1990 pour ensuite accuser le Front islamique du salut et ses branches armées d'en être les auteurs... Il semble que de mêmes soupçons pèsent aujourd'hui sur le régime Moubarak à propos des attentats contre les Chrétiens coptes à Alexandrie le 31 décembre dernier !

Ces «fouteurs de troubles» doivent partir : ils ne constituent plus une police d'assurance contre le radicalisme islamiste (l'ont-ils vraiment déjà été ?), bien au contraire puisque leur autoritarisme et leurs régimes corrompus renforcent la crédibilité des islamistes qui contestent depuis fort longtemps et constituent aujourd'hui les groupes d'oppositions les mieux organisés... De plus, les poser en victime les aidera. Et enfin, l'appui de l'occident à Moubarak ou encore à Bouteflika (et à plusieurs autres, au 1er chef la famille régnante d'Arabie saoudite) nous discrédite aux yeux de la rue arabe, ce qui peut compromettre les chances des courants modernistes et démocratiques d'émerger dans ces pays puisqu'ils seront alors présentés comme des pantins de l'occident... Il est donc important que les USA cessent leur tergiversation et commencent à exercer une réelle pression sur ces régimes pour arbitrer une transition démocratique concertée et sérieuse, mais immédiate.

Ce qu'il y a de positif dans tout ce que l'on peut observer, c'est que malgré l'autoritarisme des régimes arabes, la société civile - «la rue arabe» - semble réellement exister et ne semble pas vouloir lâcher prise non plus... Le danger par contre, serait de «personnaliser» cette crise outrancièrement : le seul départ de Moubarak ne suffira pas, des réformes constitutionnelles profondes sont nécessaires. Et là encore, les USA, dont l'Égypte dépend de façon quasi-pathétique, peuvent jouer un rôle positif s'ils exigent plus de transparance et de résultats en ce qui concerne la transition démocratique à effectuer...

Lourd programme !

mercredi 9 février 2011

Maxime Bernier (Lord Durham) et le français.


Ne voilà-t-il pas que notre Maxime Bernier national en remet et déclare que la loi 101 est inutile. Cette loi dit-il, est l'incarnation même d'une «coercition étatique» puisqu'elle oblige les enfants des francophones et les enfants des immigrants au Québec d'envoyer leurs enfants à l'école francophone, au moins jusqu'au secondaire... (quoique depuis que les libéraux de Charest ont morcelé cette loi, si on a du $$$, on peut s'en libérer...)

Il est vrai que le Canada anglais et les USA n'imposent pas cette contrainte outrancière ! Est-ce parce que ce sont des sociétés plus «libérales», plus «justes», plus «démocratiques» que le Québec, cette société «totalitaire» ou à tendance liberticide ?

Mais non Maxime, le fait que le Canada anglais ou les USA n'imposent pas de lois linguistiques (quoique la Californie, le Nouveau-Mexique et d'autres États des USA ont adopté dans les dernières années des lois de type 101 pour proclamer l'anglais langue officielle et l'imposer dans l'affichage commercial...) si contraignantes relève simplement de la logique mathématique : ils sont assez nombreux démographiquement pour que leur langue s'impose naturellement, sans pression législative. Maintenant, le Québec est-il assez démographiquement fort en Amérique pour laisser le libre-choix en matière de langue d'enseignement ? Poser la question, c'est y répondre.

Le libertarisme de Maxime Bernier est une idéologie désincarnée, qui se pose comme le «gros bon sens» de la liberté individuelle face à «l'État puissant et méchant», mais cette idéologie ne tient pas la route lorsqu'il s'agit de la mettre en oeuvre. Traiter tous les individus symétriquement dans une situation asymétrique comme celle du Québec en Amérique du Nord signifierait la mort lente mais certaine du fait français sur ce continent.

Mais Maxime Bernier n'a que faire de la réalité et des mathématiques, il préfère bâtir sa notoriété en jouant un rôle fort populaire au Canada : celui du «Canadien-français de service» qui mettra le Québec à sa place ! Après tout, Jean Chrétien (et dans une moindre mesure Pierre Elliott Trudeau avant lui) ont joué cette partition (mauvais jeu de mot) avec succès.

La personnalité de Maxime Bernier devient donc fort populaire dans le ROC (rest of Canada), et cette popularité se construit sur des préjugés persistants : le Québec est une société «illibérale», presqu'incapable d'adopter les grands principes de la liberté individuelle et de la démocratie, si ce n'est grâce à la Charte et au Canada anglais, qui deviennent alors les remparts contre notre dérive totalitaire.

(Il y a un vieux fond de la pensée de Lord Durham qui ressurgit derrière ce discours et les applaudissements qu'il génère dans le ROC : en abolissant nos lois linguistiques, le Québec respecterait davantage les grands principes du libéralisme... Durham qui en 1840 proposait l'assimilation des Canadiens-français ne pensait pas autrement, il considérait que l'anglicisation du Québec servait des ambitions «civilisatrices», donc que l'anglais nous sortirait d'une certaine barbarie pour nous faire entrer dans le libéralisme...)

170 ans plus tard, Maxime Bernier, avec toute l'épaisseur (autre jeu de mot) de sa pensée, en rajoute et devient un nouveau pion au service de l'Empire...

vendredi 4 février 2011

All Québec in Toronto.

La gallerie Thompson-Landry n'affiche que des artistes québécois, en plein centre-ville de Toronto, principale vitrine de l'art au Canada anglais. Yoakim Bélanger y est exposé à partir de jeudi soir, le 10 février.

Voir un aperçu ICI.

jeudi 3 février 2011

L'orientalisme ou le mystère des femmes musulmanes.

Le Musée des Beaux Arts de Montréal (MBAM) vient d'acquérir une toile du peintre orientaliste Joseph-Jean Benjamin-Constant. L'orientalisme est un thème important de la littérature comme des arts visuels, particulièrement au XIXe siècle.

Eugène Delacroix incarne bien l'orientalisme en peinture. Benjamin-Constant (pas le penseur, mais l'artiste) en est un admirateur... Ses voyages au Maroc lui font peindre selon un certain exotisme oriental... Le regard européen sur l'Autre transparaît dans les thèmes généralement abordés :

Moments historiques forts (Mohamed II entrant à Constantinople - 1876, ci-contre)

ou mystères de la sensualité féminine (nombreuses toiles évoquant les Harems, l'endroit où les femmes de l'entourage du Sultan sont regroupées), ainsi que les Hamams, les «bains turcs» réservés aux femmes...

Les Hamams et thermes dans les pays musulmans sont des espaces de liberté extraordinaires pour les femmes. Le mystère demeure pour l'homme en ce qui concerne l'atmosphère réelle de ces lieux. Du côté des hommes, il y a une entraide et une proximité surprenante, qui n'existe pas en occident entre les hommes... Chez nous, où l'homosexualité semble s'extirper des grands tabous, la proximité entre les hommes demeure «suspecte», on ne veut pas apparaître comme un gay... Au Maroc, là où l'homosexualité est encore bafouée et perçue comme une maladie «morbide» (on s'est même fait dire qu'elle n'existait pas «en Islam»...), les hommes s'embrassent dans la rue, marchent en se tenant la main ou se lavent mutuellement et se massent dans les hamams et les thermes. Il faut aller au moins une fois dans sa vie aux thermes de Moulay Yacoub ou dans un hamam traditionnel (et pas cher !) ailleurs pour comprendre un peu le sens de mon propos. Mais le paradoxe que je viens d'évoquer à propos des hommes existe-t-il du côté des femmes ? Celles-ci étant plus effacées dans la sphère publique (allant jusqu'à se couvrir), prennent-elles leur «revanche» dans ces espaces de liberté que sont les thermes et les hamams ?

Quoiqu'il en soit, les peintres orientalistes ont accentué cette réflexion sur le mystère des femmes musulmanes. Mystère encore à ce jour persistant.

J-A Dominique Ingres - Le bain turc - 1862.

mercredi 2 février 2011

Dans l'attente du changement de régime...


Voici une photo de Patrick Baz, photographe de l'AFP, prise au Caire. Dans l'attente du changement de régime, cette photo est une véritable oeuvre d'art...

mardi 1 février 2011

Extraits publiés...

Le journal Maghreb-Canada a décidé de publier deux de mes derniers papiers sur la situation au Maroc par rapport aux révolutions arabes en cours...
VOIR LE RÉSULTAT ICI.