Bizarre et saugrenue, en effet, la solution de M. Fortier. Qu'advient-il si les Québécois disent OUI ? Un autre match revanche dans 15 ans ? De plus, cette proposition évacue complètement une dimension fondamentale en politique : la nécessité de tenir compte de la conjoncture. C'est comme si l'homme confondait la nécessité d'élections régulières en démocratie (celles-ci pouvant d'ailleurs se tenir à date fixe) avec l'outil référendaire, qui est là pour poser une question précise à la population, en fonction de ses aspirations et conditions...
L'élection porte sur la sélection d'un gouvernement et c'est pourquoi elle doit être régulière, sans quoi nous basculons dans un régime autoritaire... Le référendum répond à d'autres exigences. Il «met en exergue» un enjeu précis et fondamental par rapport à la multitude de problèmes débattus dans l'espace public et permet à la population de se prononcer directement sur cet enjeu...
Or, non seulement M. Fortier ne comprend pas la nécessité d'analyser les phénomènes politiques en tenant compte de la conjoncture, mais il semble oublier que les référendums de 1980 et de 1995 ont justement été rendus possibles grâce à la conjoncture qui les légitimaient !
- Le référendum de 1980 correspond à ce crescendo qui nous a permis de nous décoloniser de l'intérieur en reprenant le contrôle de notre État national et de notre économie au courant de la décennie 1960. Il a été proposé à la population dans une campagne électorale et lorsque le 1er gouvernement du Parti québécois a pris le pouvoir, il a tenu sa promesse...
- Le référendum de 1995 est aussi l'aboutissement de toute une démarche politique :
- 1- la «trahison» de M. Trudeau qui, en promettant de «renouveler le fédéralisme canadien» en 1980 a pourtant modifié ce système en 1982 dans un sens complètement opposé aux demandes de toute la classe politique québécoise de l'époque. La preuve en est que la grande réforme constitutionnelle de 1982 a été rejetée unanimement par l'Assemblée nationale et qu'aucun gouvernement du Québec depuis, ni aucun parti présent à notre Assemblée nationale, n'accepte encore officiellement cette réforme. (*je considère cependant qu'en se refusant à mettre fin aux écoles passerelles ou à invoquer la clause dérogatoire, le gouvernement Charest et sa ministre St-Pierre sont en train d'accepter ce «coup» fait à notre Assemblée et ses pouvoirs...).
- 2- Lélection de Brian Mulroney comme 1er ministre du Canada qui promet alors le retour du Québec dans la famille constitutionnelle canadienne «dans l'honneur et l'enthousiasme». Ceci mènera aux 5 demandes formulées par le Québec pour accepter la réforme de 1982. Ces 5 demandes, incluant la reconnaissance du caractère distinct du Québec dans l'ordre canadien, font partie de l'Accord du lac Meech. Accord rejeté par le Manitoba et Terre-Neuve (et par l'opinion publique canadienne anglaise...)
- 3- Un 2e échec constitutionnel avec Charlottetown en 1992;
- 4- La création puis le «raz de marée» du Bloc québécois en 1993 (il devient l'opposition officielle à Ottawa !),
- 5- Le retour au pouvoir du PQ en 1994 et 6- la tenue, tel que promis, d'un autre référendum sur la souveraineté en 1995.
D'ailleurs, quelle serait la pertinence de tenir un 3e référendum sur la souveraineté aujourd'hui ? Non seulement le camp souverainiste serait irresponsable puisque chaque défaite a eu des conséquences négatives pour le Québec, mais il faudrait aussi que la question soit pressentie comme nécessaire par la population...
Alors, quelle était la motivation de M. Fortier ? Affaiblir les nationalistes au Québec puisque la conjoncture actuelle ne leur est pas nécessairement favorable à la tenue d'un 3e référendum ? Pas nécessairement.
Je pense plutôt que son intention part d'un constat intéressant : péquistes et libéraux ne sont pas si éloignés sur l'échiquier gauche-droite selon lui. Les meilleurs des 2 partis sont condamnés à s'affronter essentiellement à cause de la question nationale. Sa proposition favoriserait selon lui la formation d'équipes gouvernementales plus cohérentes - de gauche d'un côté, de droite de l'autre - rassemblant chacune des souverainistes et des fédéralistes...
Mais comme nous l'avons vu, cette solution est en pratique farfelue. Il serait plutôt préférable de nous pencher sur une réforme institutionnelle qui pourrait favoriser l'émergence d'une culture de coalition entre les partis... Ceci implique sans doute une réforme de notre mode de scrutin de façon à favoriser une représentation en sièges qui correspond réellement à l'appui populaire obtenu par les différents partis (on appelle ça une représentation de type proportionnel). Et tant qu'à nous lancer dans les réformes, pourquoi pas l'élection du 1er ministre au suffrage universel ?
En ce qui concerne le débat sur la question nationale - souveraineté ou fédéralisme renouvelé - il est pour le moment illusoire de chercher à refondre le paysage partisan en inscrivant les dates du prochain référendum à l'avance...
Repenser nos institutions dans le sens évoqué précédemment ne nie pas notre réalité politique, à savoir que la question nationale demeure la principale ligne de fracture des partis... Mais il me semble qu'un gouvernement de coalition réunissant plusieurs partis se rassemblant autour d'un programme commun aura plus de chances de réussir qu'un seul parti, d'ailleurs souvent élu avec moins de 50% des votes, pour gagner un référendum qui nécessite plus de 50%...
Fortier- comme disent les Anglais:
RépondreSupprimer"TOUCHÉ"
pepeamour
Olivier,
RépondreSupprimerton ancien prof à Brébeuf t'a répondu rapidement.
Comme dirait Pascal ou un autre quincailler :
"This guy is fast on the draw ".
pepedamour
http://pq.org/sites/default/files/congres2011_propositionprincipale.pdf
RépondreSupprimerhttp://independanceenergetique.org/
J'étais en fin de semaine au grand rassemblement du CNJPQ à Victoriaville et je peux facilement affirmer que j'étais la personne la plus à droite dans les délégués. Je représentais Hochelaga-MA, lol!!! C'est pas un des comtés les plus à gauche. lol!!! Sérieux, ce fut vraiment agréable même si la gauche de UQAM-PQ a été majoritairement gagnante. Au plaisir de se voir au souper spaghetti. L'ARROGANT