jeudi 18 mars 2010

Un nouvel épisode de Quebec bashing ?

Vous souvenez-vous de Brockville ? Des Ontariens piétinent le drapeau du Québec et affichent leur mépris à notre égard sur les ondes de la télévision, sans gêne... À la même époque, plusieurs villes ontariennes se proclament unilingues anglaises pour protester contre l'invocation par le gouvernement Bourassa de la clause dérogatoire pour maintenir l'affichage français à l'extérieur des commerces (loi 178). Les journaux de Toronto (particulièrement le National post, sous la plume de Diane Francis) discouraient à l'époque de l'illibéralité de la culture québécoise : nous serions intolérants et anti-démocratiques de nature, c'est la Conquête de 1760 qui nous auraient civilisé...

Ce discours réapparaît aujourd'hui. Le Globe and Mail poursuit sa dérive anti-Québec (après «l'affaire Jan Wong») en traitant dans sa page éditoriale du cas de l'étudiante d'origine égyptienne qui a été explusée d'un cours de francisation parce qu'elle refusait d'enlever son niqab (voile total, ne laissant qu'une mince ouverture pour les yeux...). Ce cas est bien documenté, incluant tous les efforts consentis par la professeure et l'institution pour accomoder l'étudiante en question. Mais le Globe and Mail a décidé de caricaturer le cas ou pire, de désinformer sa société qui ne rechignera pas s'il s'agit de dénigrer le Québec et de grossir les préjugés à notre endroit... Et la CBC qui a fait un reportage faussement «exclusif» et une couverture tout-à-fait incomplète de l'affaire... Imaginez une seule seconde si un journaliste québécois présentait des reportages aussi biaisés envers le Canada anglais !

Il est donc de bon ton - au pire ce n'est pas répréhensible - de faire des reportages biaisés sur le Québec et de dire comme l'ont fait les éditorialistes du Globe que le Québec se comporte comme un régime taliban en empêchant les jeunes filles d'aller à l'école et en prescrivant des tenues vestimentaires particulières (le dévoilement ?).

C'est incroyable, mais vrai : le multiculturalisme à la canadienne se drape dans une hauteur morale arrogante et insouciante. Le jour où, comme c'est le cas pour les Britanniques et les Néerlandais ces années-ci, nos voisins les Canadians comprendront qu'il faut établir des balises communes pour qu'une société fonctionne, que tout n'est pas négociable et équivalent, ce jour-là, ils commenceront à comprendre ce que le Québec a compris depuis longtemps, mais n'a pas réussi à faire pour deux raisons :
  1. Notre échec à réaliser la souveraineté a empêché le Québec de formuler clairement son projet culturel fondamental, celui sur lequel viendrait se greffer les nouveaux arrivants en l'enrichissant par leur propre contribution;
  2. L'échec des fédéralistes québécois et canadiens à s'entendre pour donner à la culture québécoise un statut de véritable culture d'accueil et d'intégration, et non simplement une composante de la grande mosaique culturelle canadienne. 
Car là aussi, le multiculturalisme est problématique : non seulement il échoue à envoyer un message aux immigrants pour qu'ils comprennent et respectent les valeurs fondamentales de notre pays, mais il met toutes les cultures sur le même pied, alors que la culture des sino-canadiens ou des canadiens d'origines pakistanaises ne cherche pas à intégrer les immigrants en son sein, c'est l'objectif de la culture québécoise ! Même les nations autochtones ne cherchent pas à se constituer en société d'accueil, elles sont ailleurs encore, dans une forme de survivance (comme nous l'étions après l'Acte d'union de 1840...).

Il nous faut réussir collectivement à briser la dynamique canadienne actuelle. Formuler notre propre constitution m'apparaît à cet effet le projet le plus ambitieux mais le plus prometteur, sans égards à la souveraineté ni au fédéralisme : un retour sur nous-mêmes et sur le type de régime politique que nous voulons collectivement. Redéfinir les assises de notre société : tel devrait-être le projet d'un parti ou d'un leader qui aspire réellement au changement.

Sans quoi nous tomberons sous peu dans l'opprobre et la vindication, coupables de ne pas respecter ces dogmes multiculturels, où tout doit être jaugé à la lumière des chartes de droits individuels, interprétées par des juges ! Voilà le Canada d'aujourd'hui : traitement symétrique des provinces et des individus. Avec toutes les dérives et inconvénients pour le Québec que cela implique. Dans cette dynamique, plus ça va, plus notre nationalisme sera présenté comme défensif, négatif, liberticide. Pourtant, notre projet était simple : nous constituer en culture moderne, en société d'accueil distincte, la seule à intégrer ses immigrants en français en Amérique.

Suivez l'actualité, j'ai même l'impression que le récent Quebec bashing cherche à influencer la réponse que Jean Charest offrira au jugement invalidant la loi 104...

5 commentaires:

  1. ..et Lucien et plusieurs autres nationalistes québecois nous disent que les priorités sont l'Education, La Santé, L'Economie et- calmons nous le ponpon: La Constitution , on met ça en veilleuse.
    Or donc, on met en veilleuse 3 options à discuter plus-tard:
    le statu quo, le Beau Risque, L'Égalité ou l'Indépendance...
    ah oui- j'oubliais...qqn a parlé de Souveraineté ??
    pepedamour.dit Yves Graton

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  2. concernant la dérive anti- Québec du Globe & Mail, qui au Québec va mettre ses culottes pour leur répondre?
    Sommes-nous des cocus heureux?
    Le Voisin ? Jean-François Lisée ?
    Il faut aller plus haut dans l'échelle québecoise:
    Ti-Jean Charest? André Pratte? Descoteaux du Devoir ?
    J'aimerais une réaction sereine et solide à la Descoteaux-Rocher...
    pepedamour i.e. Y. graton

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  3. Je suis tout à fait d'accord avec le Voisin. Il faut une constitution pour mettre un frein à tous ces zones grises et mettre des balises claires. Ce n'est pas liberticide, c'est une façon d'expliquer à l'immigrant dans quelle société il devra s'intégrer.

    En effet, les Canadiens anglais continuent de pratiquer leurs deux sports favoris: le hockey et le Quebec Bashing. Il faut vraiment que quelqu'un leur réponde avec un article puissant pour une bonne fois...Après ça nous sommes sensés vivre heureux dans un pays. Je sais que tous les Canadiens ne sont pas comme ça mais il ya toujours une demande si ces choses sont écrites.

    Philippe

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  4. Je dirais même que notre position est moins hypocrite : elle ne dit pas à l'immigrant «reste ce que tu es, tu viens enrichir notre mosaique culturelle; elle dit plutôt, il y a ici une culture publique commune qui pourra évoluer par votre contribution»...
    Lisez Le Devoir de ce samedi (1ère page), on couvre assez bien cette crise du Quebec bashing!
    Le voisin.

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